Pyrénées occitanes

Claudie Marcel-Dubois interroge Jean-Pierre Brunes à Lesponne (Hautes-Pyrénées) le 27 mars 1956 (cliché Marcel Boulin, Mucem Ph.1956.070.003)
Claudie Marcel-Dubois interroge Jean-Pierre Brunes à Lesponne (Hautes-Pyrénées) le 27 mars 1956 (cliché Marcel Boulin, Mucem Ph.1956.070.003)

Présentation

Située dans la continuité d’une rencontre faite à Paris au MNATP, en 1950, avec un joueur de hautbois ariégeois que les deux chercheuses avaient enregistré  (biographie MUS1950.015.001, air de chanson MUS1950.015.005.002), l’enquête est menée fin mars-début avril 1956 dans les Hautes-Pyrénées, les Pyrénées-Atlantiques et en Haute-Garonne.

Sur le terrain, c’est aux traditions pastorales, très riches dans cette région, que nombre d'entretiens et de captations sonores sont consacrés, mais l'enquête porte aussi sur la fabrication des instruments d'écorce, sur les offices des ténèbres et sur l'emploi des crécelles par les jeunes garçons au cours de la Semaine sainte. Le volet photographique des archives constituées est d'un exceptionnel intérêt, notamment les reportages sur les coutumes de la semaine sainte à Campan (Hautes-Pyrénées) comme sur la fabrication des cloches pour les troupeaux aux ateliers Daban à Nay (Pyrénées-Atlantiques).

Contexte

L'enquête de terrain se déroule entre le 26 mars et le 8 avril 1956. Elle a été préparée sur place par Marcel Boulin (1919-1983), disciple et ancien collaborateur de Georges Henri Rivière qui venait d'être nommé conservateur du musée Massey, à Tarbes, lui-même assisté par deux étudiants toulousains, respectivement en ethnologie (Pierre Ducos) et en phonologie (Gisèle Fourcade). Sur le plan pratique, ce sont eux qui ont arrangé les rendez-vous avec les informateurs. Ils ont aussi réalisé une manière de sondage dans les paroisses qui seraient visitées sur les pratiques musicales en période pascale. Présents sur le terrain aux côtés de Marcel-Dubois et de Pichonnet-Andral, ils ont apporté un précieux concours linguistique et Marcel Boulin a pris en charge l'essentiel de la couverture photographique.

Dans cet équipage, la mission a traversé la Haute-Garonne, les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques, se rendant en Bigorre, dans la plaine de Tarbes, sur le plateau de Lannemezan, dans les Baronnies, les vallée de Luz, d’Argelès, de Campan et de Lesponne, à Labassère, en Comminges (Cier-de-Rivière et Ardiège), le périple s'achevant au musée basque de Bayonne pour des prises de vues d'instruments.

Page 1 du rapport de mission (FRAN_0011_06041)
Page 1 du rapport de mission (FRAN_0011_06041)


Elle a ainsi permis d'effectuer plus de trois cents enregistrements et de couvrir  différents aspects de la vie musicale communautaire, surtout chantée. On y entend par exemple des chanteurs au répertoire bilingue, aussi riche en français qu'en occitan (ici, Jean-Pierre Chelles chantant Quem bos gagna pastourello gentillo ? Combien veux-tu gagner pastourelle gentille). Ont été enregistrés des danses chantées, des rondes, des berceuses et des noëls (ici la pastorale de Labassère), mais aussi des chants de carnaval et à boire, des chants de travail (pour filer le lin ou garder les chèvres), ou encore des formulettes pour fabriquer les hautbois d’écorce, sans oublier la musique de la danse du "Baïar" (Bayard), recueillie à Esquièze

Jeune garçon d'Esquièze (Hautes-Pyrénées) portant la toque d'un des personnages du Baïar, 30 mars 1956 (cliché Marcel Boulin, Mucem, Ph.1956.070.160)
Jeune garçon d'Esquièze (Hautes-Pyrénées) portant la toque d'un des personnages du Baïar, 30 mars 1956 (cliché Marcel Boulin, Mucem, Ph.1956.070.160)

 Un intérêt particulier a été porté à la fabrication d'instruments insolites, notamment le hautbois d’écorce (MUS1956.003.139 et 141) ou "bramevac", et des informations ont été recueillies quant à son emploi dans les charivaris.

Les dates de la mission avaient été choisies pour coïncider avec la Semaine sainte, ce qui a permis d'étudier les chants religieux propres à cette période liturgique mais aussi les bruits produits par les crécelles et les  tambours à friction toholon (renommé peu idiomatiquement toulouhou par les enquêtrices), tous instruments suppléant le silence des cloches joués par les enfants, tant à l'église durant les offices des "ténèbres" que dans les rues.

eudi saint 1956 : les garçons de Betpouey déambulent dans les rues du village avec les instruments des "ténèbres"  (Cliché Marcel Boulin, Mucem Ph.1956.070.087)
Jeudi saint 1956 : les garçons de Betpouey déambulent dans les rues du village avec les instruments des "ténèbres"  (Cliché Marcel Boulin, Mucem Ph.1956.070.087)


Comme à Barjols en 1954 et l'année suivante dans les Vosges, l'enquête a enfin comporté la réalisation d'un reportage organologique, à la fois photographique [Ph.1956.070.246 à 311] et sonore [MUS1956.003.157 à 207], portant cette fois sur les ateliers Daban de Nay (Pyrénées-Atlantiques), spécialisés dans la fabrication des cloches pour les animaux d'élevage (voir la page consacrée au fabricant ici).

Mise au son d'une sonnaille par Jean Daban, Nay (Pyrénées-Atlantiques), 4 avril 1956 (cliché Marcel Boulin, Mucem Ph.1956.070.300)
Jean Daban, directeur des ateliers éponymes à Nay (Pyrénées-Atlantiques), fait tinter une cloche qui vient d'être usinée, 4 avril 1956 (cliché Marcel Boulin, Mucem Ph.1956.070.300)

 

Données de l'enquête

Elles sont réparties en deux sous-collections. La première juxtapose les 19 enregistrements faits le 16 octobre 1950 à Paris, au MNATP, auprès du joueur de hautbois ariégeois Alphonse Seintein (MUS1950.015), aux notes manuscrites de Claudie Marcel-Dubois prises durant la séance (cote FRAN_0011_20130043_050).
Consulter le fonds d'archives sur Didόmena

La seconde, qui correspond au déplacement sur le terrain de l'année 1956, comprend 309 fichiers sonores (MUS1956.003), 387 photographies formant 4 séries (Ph.1956.070, 071 et 072, Ph.1957.127) et 1558 fichiers d’archives textuelles (incluant aussi des photographies anciennes), ventilés dans 41 dossiers relevant de 2 cotes (FRAN_0011_2013043_065 et 066).
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Rédacteurs: François Gasnault et Amandine Marteel
Remerciements à Jean-Jacques Castéret (CIRDOC - Institut occitan de cultura)